Thursday, March 23, 2017

Mao Dun, « Minuit »

Shen Dehong (1896-1981) est l’une des figures de proue de la littérature chinoise contemporaine et l’auteur de Minuit, œuvre pour laquelle il choisit Mao Dun comme « pen name ». Mao Dun signifie contradiction, ce qui reflète, aux yeux de l’auteur, l’esprit de l’époque. Il fut ministre de la culture sous la République Populaire de Chine de 1949 a 1965, c'est-à-dire de l’instauration de la République jusqu'à l’année précédent la révolution culturelle menée par Mao Zedong.


Minuit fut publie en 1933, la même année que La Condition humaine d’André Malraux. Lors de sa sortie, il fut reconnu, selon Qu Qiubai (theoricien marxiste), comme le « premier roman réaliste de la littérature chinoise ». En effet, l’auteur affirme que le roman a été réalisée selon les méthodes réalistes. Il s’est base sur une solide documentation et à etabli la liste des personnages a l’avance afin de couvrir l’ensemble des couches sociétales qui l’intéressaient. Cependant, de son propre aveux (Conférence faite par l’auteur a Sinkiang en 1939), Mao Dun reconnait avoir réduit son plan initial de moitie. Etant presse par le temps et souhaitant éviter la censsure qui sévissait a l’époque, il se concentra sur les habitants des villes, mettant les industriels au premier plan. Il percevait l’absence de révolutionnaires parmi les personnages principaux comme la plus grande faiblesse de l’œuvre. Ceci n’enlève rien a l’intérêt suscite par le livre lors de sa sortie et a la reconnaissance accordée a l’auteur pour son habileté.


Minuit traite de façon détaille le monde des affaires shanghaiens et sa décadence. L’histoire se situe à la fin du printemps 1930 et elle s’étend jusqu'à l’été de la même année. Elle met en scène une grande nombre de personnages, tous relies de façon directe ou indirecte au businessman Wou Souen-fou. Ce personnage est un entrepreneur compétent qui tente avec  vigueur de développer l’industrie nationale de la soie. Sa volonté se heurte à un contexte défavorable causé notamment par la guerre civile qui fait rage dans le pays. Son autorité vacille, au même titre que son capital. Afin se renflouer, il se lance dans la spéculation sur les bons d’emprunts, ce qui ne fait qu’accroitre les pertes. Il doit alors réduire les couts et de ce faite s’en prendre aux conditions de travails de ses ouvrières. A une époque ou l’idéologie communiste sévie, la grève est inévitable. Peu à peu, Wou Souen-fou coule. Il s’enfonce sous les attaques impitoyables de son adversaire Tchao Po-Tao, qui parvient à influencer la bourse grâce a ses contacts politico-militaire. Son capital décroit jusqu’au coup final portée par son beau-frère Tou Tchou-tchai. L’échec paraissait inévitable. Les chutes se faisaient plus franches, les status quo se transformaient en victoire.
En parallèle des intrigues financières qui prennent énormément de place dans le roman, Mao Dun dépeint la fin d’une ère, le début d’une autre. Dans le premier chapitre, c’est la vieille génération qui meurt avec Vieux-Seigneur Wou. Une génération de tradition. Cette disparition n’empêche en rien les industriels de vaquer a leurs affaires, en témoignent les pourparlers menes au moment même de la mise en bière de Vieux-Seigneur. L’ancienne génération persiste cependant. Elle est représente dans la suite du roman par Wou Houei-fang. Cette dernière demeure isolée, incomprise du reste des personnages. Certains tentent en vainc d’expliquer le comportement de la jeune fille mais il échappe a leur entendement.
Tout se passe à une vitesse folle dans une ville aussi dynamique que le Shanghai représenté par l’auteur. Les entrepreneurs font fortune et périclitent au rythme infernal de la bourse. La bourse elle-même est conditionnée par une guerre qui parait lointaine, faite des seuls chiffres de la hausse et de la baisse. On ne sait plus si la guerre conditionne les fluctuations de la bourse ou si les spéculateurs eux-mêmes influencent la guerre. La bourse donne le vertige, en témoigne le malaise de Wou Souen-fou dans l’avant dernier chapitre.
Outre la bourse, l’auteur introduit de nombreux symboles de la modernité tels que les voitures, les cigares, les longues robes moulantes … Tous ces éléments sont omniprésents dans le récit. Ils apparaissent de façon fréquent de même que l’appétit de tout ce qui est Européen ou rappelle l’Europe. En effet, les « beautés européennes » sont très prisées.
Des cabanes des ouvrières, en passant par l’avenue de Nankin et les banlieues industrielles de Chapei, Shanghai semble cerné. La ville est entourée par les foyers communistes qui montent en puissance. Les troubles sont maitrises mais la rage monte peu a peu avec le grondement de l’orage. Cette rage ne de l’injustice sociale. Le cout de la vie augmente. Tandis que Wou investit 500 000 yuans dans les bons d’emprunts, les salaires des ouvrières sont sabordes et avoisinent les 20 ou 30 yuans par mois. L’écart est renforce par les descriptions des lieux d’habitations, des personnages. Les ouvrières habitent des cabanes, leurs familles s’usent au travail tandis que la bourgeoisie s’adonne a l’oisiveté ou vaque a des études poétiques. Elle habite des maisons luxueuses ou s’ébat dans des hôtels cossus comme l’Hôtel Cathay et donne des noms de femmes a ses bateaux comme le « Mam-li ».
Les businessman quant à eux ne chôment pas mais demeurent bien loin de la réalité. Ils planent dans les vapeurs de la bourse, loin de leurs familles, perdus dans leurs préoccupations financières. Le monde disparait. La spéculation devient la seule réalité. Si le capital s’effondre, c’est tout un monde qui sombre, celui de la bourgeoisie.
L’ensemble de ces éléments témoignent de profond changement. Ils ne sont pas le fruit de l’imagination de l’auteur mais font partie d’une réalité qui anime le monde intellectuelle de l’époque, suscitant questionnement et inquiétude. Mao Dun, quant a lui, se montrait optimist face a l’invasion de la société de consommation, voyant Shanghai comme ville de premier importance. La « première métropole du monde, métropole de la consommation ».

RISTEVSKA Ivana
Master 1 LCSA Chinois




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