Shen Dehong
(1896-1981) est l’une des figures de proue de la littérature chinoise
contemporaine et l’auteur de Minuit, œuvre pour laquelle il choisit Mao Dun
comme « pen name ». Mao Dun signifie contradiction, ce qui reflète, aux yeux de
l’auteur, l’esprit de l’époque. Il fut ministre de la culture sous la République
Populaire de Chine de 1949 a 1965, c'est-à-dire de l’instauration de la République
jusqu'à l’année précédent la révolution culturelle menée par Mao Zedong.
Minuit fut publie en 1933, la même année
que La Condition humaine d’André Malraux. Lors de sa sortie, il fut reconnu,
selon Qu Qiubai (theoricien marxiste), comme le « premier roman réaliste
de la littérature chinoise ». En effet, l’auteur affirme que le roman a
été réalisée selon les méthodes réalistes. Il s’est base sur une solide
documentation et à etabli la liste des personnages a l’avance afin de couvrir
l’ensemble des couches sociétales qui l’intéressaient. Cependant, de son propre
aveux (Conférence faite par l’auteur a Sinkiang en 1939), Mao Dun reconnait
avoir réduit son plan initial de moitie. Etant presse par le temps et
souhaitant éviter la censsure qui sévissait a l’époque, il se concentra sur les
habitants des villes, mettant les industriels au premier plan. Il percevait
l’absence de révolutionnaires parmi les personnages principaux comme la plus
grande faiblesse de l’œuvre. Ceci n’enlève rien a l’intérêt suscite par le
livre lors de sa sortie et a la reconnaissance accordée a l’auteur pour son habileté.
Minuit traite de
façon détaille le monde des affaires shanghaiens et sa décadence. L’histoire se
situe à la fin du printemps 1930 et elle s’étend jusqu'à l’été de la même année.
Elle met en scène une grande nombre de personnages, tous relies de façon
directe ou indirecte au businessman Wou Souen-fou. Ce personnage est un
entrepreneur compétent qui tente avec vigueur de développer l’industrie nationale de
la soie. Sa volonté se heurte à un contexte défavorable causé notamment par la
guerre civile qui fait rage dans le pays. Son autorité vacille, au même titre
que son capital. Afin se renflouer, il se lance dans la spéculation sur les
bons d’emprunts, ce qui ne fait qu’accroitre les pertes. Il doit alors réduire
les couts et de ce faite s’en prendre aux conditions de travails de ses ouvrières.
A une époque ou l’idéologie communiste sévie, la grève est inévitable. Peu à
peu, Wou Souen-fou coule. Il s’enfonce sous les attaques impitoyables de son
adversaire Tchao Po-Tao, qui parvient à influencer la bourse grâce a ses
contacts politico-militaire. Son capital décroit jusqu’au coup final portée par
son beau-frère Tou Tchou-tchai. L’échec paraissait inévitable. Les chutes
se faisaient plus franches, les status quo se transformaient en victoire.
En parallèle des
intrigues financières qui prennent énormément de place dans le roman, Mao Dun dépeint
la fin d’une ère, le début d’une autre. Dans le premier chapitre, c’est la
vieille génération qui meurt avec Vieux-Seigneur Wou. Une génération de
tradition. Cette disparition n’empêche en rien les industriels de vaquer a
leurs affaires, en témoignent les pourparlers menes au moment même de la mise
en bière de Vieux-Seigneur. L’ancienne génération persiste cependant. Elle est représente
dans la suite du roman par Wou Houei-fang. Cette dernière demeure isolée,
incomprise du reste des personnages. Certains tentent en vainc d’expliquer le
comportement de la jeune fille mais il échappe a leur entendement.
Tout se passe à une vitesse folle dans une
ville aussi dynamique que le Shanghai représenté par l’auteur. Les entrepreneurs
font fortune et périclitent au rythme infernal de la bourse. La bourse
elle-même est conditionnée par une guerre qui parait lointaine, faite des seuls
chiffres de la hausse et de la baisse. On ne sait plus si la guerre conditionne
les fluctuations de la bourse ou si les spéculateurs eux-mêmes influencent la
guerre. La bourse donne le vertige, en témoigne le malaise de Wou Souen-fou
dans l’avant dernier chapitre.
Outre la bourse, l’auteur introduit de
nombreux symboles de la modernité tels que les voitures, les cigares, les
longues robes moulantes … Tous ces éléments sont omniprésents dans le récit.
Ils apparaissent de façon fréquent de même que l’appétit de tout ce qui est Européen
ou rappelle l’Europe. En effet, les « beautés européennes » sont très
prisées.
Des cabanes des ouvrières, en passant par
l’avenue de Nankin et les banlieues industrielles de Chapei, Shanghai semble cerné.
La ville est entourée par les foyers communistes qui montent en puissance. Les
troubles sont maitrises mais la rage monte peu a peu avec le grondement de
l’orage. Cette rage ne de l’injustice sociale. Le cout de la vie augmente.
Tandis que Wou investit 500 000 yuans dans les bons d’emprunts, les salaires
des ouvrières sont sabordes et avoisinent les 20 ou 30 yuans par mois. L’écart
est renforce par les descriptions des lieux d’habitations, des personnages. Les
ouvrières habitent des cabanes, leurs familles s’usent au travail tandis que la
bourgeoisie s’adonne a l’oisiveté ou vaque a des études poétiques. Elle habite
des maisons luxueuses ou s’ébat dans des hôtels cossus comme l’Hôtel Cathay et
donne des noms de femmes a ses bateaux comme le « Mam-li ».
Les businessman quant à eux ne chôment pas
mais demeurent bien loin de la réalité. Ils planent dans les vapeurs de la
bourse, loin de leurs familles, perdus dans leurs préoccupations financières.
Le monde disparait. La spéculation devient la seule réalité. Si le capital
s’effondre, c’est tout un monde qui sombre, celui de la bourgeoisie.
L’ensemble de
ces éléments témoignent de profond changement. Ils ne sont pas le fruit de
l’imagination de l’auteur mais font partie d’une réalité qui anime le monde
intellectuelle de l’époque, suscitant questionnement et inquiétude. Mao Dun,
quant a lui, se montrait optimist face a l’invasion de la société de
consommation, voyant Shanghai comme ville de premier importance. La « première métropole du monde, métropole
de la consommation ».
RISTEVSKA Ivana
Master 1 LCSA
Chinois
No comments:
Post a Comment